L’histoire de ibrahim
Je m’appelle Ibrahim.
Je suis né le 26 mars 2009, à Damas en Syrie. Je me souviens encore des jours ensoleillés de mon enfance, quand je jouais avec mes amis dans les rues de ma ville. La vie semblait simple et belle. Et un jour, les adultes se sont mis à parler à voix basse, les visages sont devenus inquiets et les ombres de la guerre ont envahi notre quotidien.
J’avais cinq ans quand ma vie a basculé. Mon père a été emporté par la guerre. Je me souviens encore du jour où nous avons appris la nouvelle. Aucun mot ne peut décrire la douleur que j’ai ressentie à ce moment-là : c’était comme si une partie de moi-même s’était éteinte avec lui.
Depuis, il y a un vide dans mon coeur.
J’ai dû en même temps faire face à la maladie. Je souffre d’une faiblesse hépatique et d’hémolyse. Je suis obligé de prendre des médicaments régulièrement pour stabiliser mon état. J’essaie de vivre aussi normalement que possible, même si ce n’est pas toujours facile. Quand la guerre est devenue insupportable, ma famille a pris la décision la plus difficile de notre vie : fuir la Syrie. Le voyage vers le Liban a été long, fatigant, et effrayant. Nous ne savions pas ce qui nous attendait, mais rester en Syrie signifiait risquer nos vies. Nous avons fini par trouver refuge dans un camp au Liban. Ce n’était pas ce que nous avions espéré, mais c’était notre seule option.
Pendant deux ans, je ne suis pas allé à l’école. Je me sentais perdu sans cette routine, sans possibilité d’apprendre. Quand j’ai enfin pu reprendre mes études, ce n’était pas facile. Entouré d’enfants plus jeunes que moi de deux ans, je me sentais en retard. Mais malgré tout, je n’ai jamais abandonné, je me suis accroché à l’idée que l’éducation était ma chance de construire un avenir meilleur.
L’Unité Mobile Éducative, ce bus transformé en école qui vient dans les camps, a été une véritable bouée de sauvetage pour moi. Grâce à leurs cours et au soutien que j’y ai reçu, j’ai rattrapé mon retard, repris confiance en moi, et me sens capable de réussir. Chaque jour, je m’efforce de progresser, de me rapprocher un peu plus de mes rêves.
Mon rêve est simple mais signifie beaucoup pour moi : je veux devenir coiffeur pour hommes.
C’est une façon de bâtir quelque chose de solide, de stable, dans un monde qui ne l’a jamais été pour moi. Être coiffeur, c’est plus qu’un travail, c’est une promesse d’un avenir meilleur, d’une vie où je pourrais prendre soin de ma famille comme ma mère a pris soin de moi.
Mais au-delà de cela, je rêve aussi de voyager, de découvrir de nouveaux horizons, d’explorer des endroits où je pourrais enfin trouver la paix. Bien sûr, je pense souvent à mon père, à ce qu’aurait été ma vie s’il avait encore été là. Parfois, je ferme les yeux et j’imagine sa chaleur, sa présence rassurante. Je veux honorer sa mémoire en réalisant mes rêves, en construisant une vie dont il serait fier.
Voilà, c’est mon histoire, marquée par la douleur, mais aussi par l’espoir. Je sais que le chemin est encore long, mais je suis prêt à l’emprunter, un pas après l’autre, vers un avenir meilleur.
Histoire d’Ibrahim illustrée par Aymeline Cousin
Soutenir l’enfance au Proche-Orient