L’histoire de rebecca
Je m’appelle Rebecca.
Je suis née le 12 avril 2016, à Alep en Syrie. A ma naissance, ma ville était déjà plongée dans une période sombre, marquée par les conflits et la guerre. J’ai grandi entourée de bruit et de destruction, dans un monde où les explosions étaient routine et où les bâtiments s’écroulaient comme des châteaux de sable.
Aujourd’hui, je vis dans le quartier Midane, un endroit particulièrement dévasté par les combats. Ici, les rues sont encore jonchées de débris et les bâtiments sont pour la plupart des squelettes, marqués par les éclats d’obus. Je vis dans une petite maison en mauvais état avec mes parents et mes deux frères.
Les fenêtres sont très fines, et l’hiver le vent s’engouffre dans les pièces, apportant froid et poussière. Mon père conduit un taxi, ma mère coud des vêtements. Nous n’avons pas beaucoup d’argent, et à la maison, c’est souvent très difficile. Les disputes entre mes parents sont fréquentes. Je crois que c’est à cause de l’argent, de la fatigue. Chaque fois qu’ils se crient dessus, je me sens un peu plus seule.
Parfois, j’ai l’impression d’être invisible. Mes parents sont tellement pris par leurs soucis qu’ils ne remarquent plus vraiment mes peines. Leur travail est devenu pour moi le symbole de tout ce qui ne va pas. Ils passent tellement de temps à cela qu’ils n’ont plus de temps pour moi.
Je me souviens des rares moments où nous étions heureux. Maintenant, ces moments sont comme des rêves lointains. J’essaie de me rappeler le son du rire de mes parents, mais il se mélange souvent avec les disputes actuelles.
À l’école, je ne ressemble pas aux autres enfants. Mes vêtements sont souvent usés et cela me fait de la peine. Je vois bien les regards des autres élèves, même s’ils ne disent rien.
Les devoirs ? Je me débrouille seule, mais parfois, je me sens dépassée, comme si les mots et les chiffres dansaient devant mes yeux, sans que je puisse les attraper.
Quand je suis arrivée au centre de soutien scolaire à Alep, j’étais en colère contre le monde entier. Je me disputais avec les autres enfants, je n’écoutais pas les enseignants, je criais tout le temps. Mais au fond, ce que je voulais, c’était un peu d’amour, un peu d’attention. Personne ne m’a jugée pour ma colère, mais ont cherché à comprendre d’où elle venait. Ils m’ont montré qu’il était possible de guérir, de trouver une lueur d’espoir, même dans les pires situations.
Grâce au soutien de chacun de mes professeurs, j’ai commencé à prendre soin de moi, à m’intéresser à mes devoirs. J’ai découvert que j’avais envie de réussir à l’école. Pour la première fois depuis longtemps, j’ai ressenti une forme de fierté. Depuis, je construis chaque jour mon avenir car c’est ce qui me donne de la force pour avancer. J’ai envie de me sentir importante, d’être aimée et j’ai des rêves à partager.
Je rêve de paix, d’amour, d’un avenir où je pourrais enfin me sentir en sécurité et chérie. Je rêve de reconstruire ma ville, de voir Alep renaître de ses cendres, avec des rues remplies de rires d’enfants et non plus de l’écho des bombes. J’aspire à un monde où la guerre ne serait qu’un mauvais souvenir, où chaque enfant pourrait grandir sans crainte, entouré de l’amour de sa famille.
Un jour, j’espère pouvoir regarder en arrière et voir que tous ces efforts, toute cette douleur, auront mené à quelque chose de beau, quelque chose qui vaudra la peine d’être vécu.
Histoire de Rebecca illustrée par Myriam Rawick
Soutenir l’enfance au Proche-Orient